Il y a plusieurs façons de faire pousser une plante : vous pouvez la cultiver hors sol, sur un substrat liquide, protégée par une serre qui la soustraira aux aléas climatiques ou choisir une variété adaptée à votre région et votre climat, apporter le plus grand soin à sa plantation puis l’entretenir régulièrement au fil des saisons… Tout est une question de choix.
Il en va de même pour votre maison : vous couper du monde ou trouver un équilibre entre vous, l’intérieur et l’extérieur.
Rechercher un équilibre c’est déjà permettre l’évaporation rapide de la vapeur d’eau contenue dans les murs et qui provient, d’une part des remontées capillaires des eaux du sol, d’autre part des condensations provoquées par l’occupation du bâtiment. C’est protéger le mur sans constituer une barrière étanche et favoriser les échanges hygrométriques. C’est aussi créer une protection extérieur souple qui puisse suivre, sans fissurer, les déformations faibles mais constantes du bâtiment. La bonne adhérence de cette protection au support sur lequel elle est appliquée dépend uniquement de la compatibilité entre le liant et le support.
L’apparition au XIXe siècle des ciments artificiels et des chaux hydrauliques, communément appelées “chaux blanches”, a provoqué l’abandon progressif de l’utilisation des chaux aériennes pour la réalisation des maçonneries et des enduits extérieurs. Cependant, trop raides, les enduits à base de ciment fissurent. Trop étanches, ils empêchent le mur de respirer. En retenant l’humidité ils peuvent être à l’origine d’importants désordres : fissures, cloquages, décollements par plaques, remontées d’humidité, pourrissement des bois en contact avec la maçonnerie, etc.
Aux dommages causés à la structure des bâtiments il faut ajouter, après plusieurs dizaines d’années d’emploi généralisé d’enduits à base de ciment et de chaux hydrauliques artificielles sur les bâtiments anciens, un enlaidissement et un appauvrissement considérables du patrimoine bâti français accentués par la disparition des ornements qui participaient à l’architecture (corniches, moulures, tableaux…).
Il est extrêmement important de bien faire la différence entre la chaux aérienne (la seule qui puisse être utilisée mélangée au plâtre gros) et la chaux hydraulique naturelle (=petit ciment) ou artificielle (=ciment). En effet, chaux et ciment s’obtiennent par la calcination de calcaires naturels mais, suivant la proportion des éléments qui s’ajoutent au carbonate de chaux dans la composition du calcaire, on obtient à la cuisson des produits dont les propriétés sont fondamentalement différentes :
- Le ciment est le résultat de la carbonisation de calcaire et d’argile.
- La chaux hydraulique, ou “chaux blanche” est obtenue à partir de calcaires argileux. Elle a les propriétés du ciment car c’est en fait un ciment riche en chaux qui fait sa prise en présence d’eau. Le ciment, ainsi que les chaux hydrauliques ne doivent pas être employés pour la confection des enduits au plâtre : les réactions chimiques (formation de sels) provoquées par la présence de ciment ou de chaux hydraulique dans le plâtre, entraînent la destruction de l’enduit. Les “classes de résistance” indiquées sur les sacs (NHL 2, NHL 3.5, NHL 5) précisent le degré d’hydraulicité du liant. Il faut bien savoir qu’une chaux hydraulique naturelle (non adjuvante) a une prise hydraulique (avec l’eau) qui se poursuit toujours par une carbonatation aérienne (avec le CO2 de l’air). Ainsi, une chaux NHL2 sera moins hydraulique (ou plus aérienne) qu’une chaux NHL5 mais, attention, chaque marque a ses spécificités : la chaux NHL 3.5 Calcia est plus grise mais reste moins hydraulique que la NHL 3.5 Saint-Astier… Faites vos essais puis gardez les mêmes produits car vous les connaitrez.
- La chaux aérienne est obtenue à partir de calcaires très purs. On la trouve sous forme de “chaux vive” ou de “chaux (vive) éteinte”. La chaux vive est vendue en morceaux et la chaux éteinte en pâte prête à gâcher. Vous pouvez bien sûr “éteindre” vous même votre chaux vive achetée en coopérative agricole pour un prix défiant toute concurrence. Il faudra alors la laisser “mûrir” quelques mois. Les Italiens considèrent qu’une chaux en pâte vieillie 3 mois est un minimum et seulement pour des travaux grossiers. Ils ont même créé un label pour garantir sa qualité et son âge de 12 à 48 mois. Quand à la chaux aérienne éteinte, ou “chaux grasse”, elle est vendue en poudre ou “fleur de chaux” (hydratée en usine puis broyée). Cette chaux C.A.E.B. (Chaux Aérienne Éteinte pour le Bâtiment), est définie par une norme AFNOR (P 15-510). Deux autres normes (P 15-512 et 513) définissent ses propriétés.
A la différence des ciments et des chaux hydrauliques qui font leur prise par réaction avec l’eau dans de courts délais, la chaux aérienne fait sa prise au contact du gaz carbonique de l’air et ce, pendant un temps très long (environ un centimètre d’épaisseur par an). On dit qu’elle “carbonate”. Avec la chaux aérienne, on obtient des enduits très plastiques, devenant de plus en plus résistants avec le temps et qui laissent “respirer” le mur et se dilate avec lui. Elle n’enrobe pas les grains de sable : un brossage doux, un lavage léger, un resserrage à la truelle dans les 24 heures suivant l’application de l’enduit, vous permettront de jouer avec les matières, les couleurs et les textures des grains de sable.
Attention, le durcissement long et progressif de la chaux aérienne (mais aussi des chaux hydrauliques puisqu’elles ont une part aérienne) vous obligera à travailler aux intersaisons : ni trop chaud, ni trop froid, protéger du soleil direct et bien humidifier les supports. Sinon, faites vite des photos : vous n’en profiterez pas plus d’une année et votre beau travail ne sera plus qu’un souvenir.
Notes sur les marquages, dénominations et normalisations :
La résistance à la compression
Sans trop rentrer dans les détails techniques, il faut quand même revenir sur les informations que vous trouverez sur les sacs de chaux du commerce. La classe de résistance d’une chaux se mesure en Méga Pascals (MPa) ou en Newton (N) par mm2 *. Les chaux hydraulique sont classées en trois grandes catégories à partir de la résistance à 28 jours. Ors, une chaux pour être classée en NHL2 doit avoir une résistance comprise entre 2 et 7 MPa, une chaux NHL3,5 entre 3,5 et 10 MPa et une chaux NHL5 entre 5 et 15 MPa… On se rend alors compte que certaines références pourraient indifféremment passer d’une classe à l’autre.
D’autre part, les résistances mesurées à 28 jours négligent la reconnaissance du durcissement par carbonatation qui s’effectue de façon très significative dans les mois qui suivent l’application.
D’où l’importance de tester et connaitre vos produits.
* 1 bar = environ 1 Kg/cm2 = 0,1 MPa = 0,1 N/mm2
La finesse du liant
Plus la chaux est fine, plus son pouvoir couvrant et sa capacité d’enrobage des agrégats sont élevés. C’est la finesse Blaine, mesurée en cm2 par gramme, qui indique la finesse issue de l’extinction et de la mouture.
Cette donnée n’est pas indiquée sur les sacs.
Voici, en moyenne, la finesse Blaine des liants du commerce :
- Ciments : de 3000 à 6000 cm/g2
- Chaux hydrauliques naturelles : de 8000 à 13 000 cm/g2
- Chaux aériennes : de 15 000 à 20 000 cm/g2
- Chaux aérienne en pâte : plus de 30 000 cm/g2