En théorie, une “peinture” à la chaux est composée d’eau, d’un liant (la chaux), de pigments et d’adjuvants (talc, agent mouillant, rétenteur d’eau…) qui améliorent l’application et la tenue, et éventuellement d’une charge (craie ou blanc de Meudon, blanc d’Espagne, poudre de marbre, sulfate de Baryum…).
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Chaulage, badigeon, eau forte, patine, glacis...
Connaitre son support
A fresco, a secco
Les adjuvants
Les charges
Les pigments
Chaulage, badigeon, eau forte, patine, glacis…
Tout est une question de proportion dans le mélange entre l’eau et la chaux.
Dosé à 1 volume de chaux pour 1 volume d’eau, le chaulage est le plus couvrant. Il comble les fissures fines et le faïençage de l’enduit. La couche est épaisse, grasse, chargée. L’aspect est “cordé” et laisse souvent apparaître les traces de la brosse. Des passes successives n’apporteront pas de surcroit de teinte car le mélange n’est pas transparent contrairement aux badigeons, aux eaux fortes et aux patines.
Le badigeon est dosé à 1 volume de chaux pour 2 à 4 volumes d’eau, selon la transparence souhaitée.
L’Eau forte est une eau saturée en chaux (l’eau pouvant absorber 3,8 % de son poids en chaux). Elle est transparente et sert à délayer les teintures, sans changer la teinte finale. Les proportions du mélange sont de 4 à 6 volume d’eau pour 1 volume de chaux.
La patine estompe et nuance la teinte finale. Elle n’est que transparence. On peut alors monter de 10 à 20 volumes d’eau pour 1 volume de chaux.
Personnellement, je n’utilise pas de chaux dans mes patines mais seulement de l’eau et des pigments. A titre d’exemple, pour apporter la teinte finale sur une restauration de pierre de taille avec un mélange plâtre/chaux/sables, je procède en deux étapes :
- Patine 1 : 3 litres d’eau avec 10g de pigment Terre de Sienne, appliqué « spugniata » (discontinue) à l’éponge naturelle.
- Patine 2 : 3 litres d’eau avec 10g de pigment Terre d’ombre naturelle (effet de vieillissement), appliqué « spugniata » (discontinue) à l’éponge naturelle.
Le résultat sera un mélange de 4 nuances : le mortier pierre non taché / la patine 1 / la patine 2 / les patines 1 et 2 superposés.
Cet exemple basé sur 10g de pigment dans 3 litres d’eau est à adapter. Faites des essais pour trouver le bon ton. Mieux vaut appliquer une patine trop faible que trop forte, difficile à enlever.
Connaitre son support
Pour utiliser un badigeon à la chaux, vous devrez disposer d’un support ouvert, c’est à dire un fond poreux et absorbant qui laisse passer l’air. Un enduit à la chaux est bien sûr le support idéal du badigeon.
Dans la cas contraire, quand le support est fermé (placoplâtre, fond peint…), qu’il ne respire pas et ne retient pas l’eau, il faudra d’abord réaliser une primaire d’accroche composée d’eau et d’un fixateur comme le latex ou la résine acrylique (dosé à 1 volume d’eau pour 1 volume de fixateur). Ce mélange, appliqué en fine couche, devra tirer quelques minutes (collant au doigt sans laisser de trace d’humidité) avant que vous ne passiez le badigeon.
Vous devrez aussi ajouter un fixateur à votre badigeon. Il y a les fixateurs naturels comme la caséine, la colle de peau, l’huile de lin… Et artificiels comme l’acétate de vinyle. Le dosage moyen varie de 5 à 10% par rapport au poids de la chaux (en fonction du support).
L’acétate de vinyle garde le côté velouté de la chaux. Il se combine bien avec la caséine qui donne du lubrifiant et augmente la qualité du fixateur. A titre d’exemple, pour un badigeon sur support fermé, on peut ajouter 2,5% de caséine et 7,5% d’acétate de vinyle (dosage à 10% du poids de la chaux).
Ne surdosez jamais et faîtes des essais sur un support similaire à celui sur lequel vous appliquerez votre badigeon. Et n’accélérez pas le séchage artificiellement, vous fausserez à la fois le pourcentage de fixateur et la teinte finale.
Personellement, je n’utilise jamais de badigeon sur un support fermé ou sur du bois (problèmes de farinage et de décollements). La première raison est que le coût de revient est beaucoup trop élevé, la seconde que cette “cuisine” est trop artificielle à mon goût et manque de cohérence par rapport au support. Je préfère alors d’autres techniques comme la peinture à la colle de peau ou la peinture à l’huile.
A fresco, a secco
Bien des termes, en architecture et en décoration, nous viennent des italiens qui étaient passés maîtres dans ces arts.
Peindre a fresco signifie “dans le frais”, sur un enduit intonaco, avant qu’il ne soit sec. Les pigments pénètrent alors dans la masse et font corps avec l’enduit qui les fixe. La teinte aura la durée de vie de l’enduit. C’est une solution à privilégier en extérieur. L’effet coloré sera plus marqué a fresco, et encore plus si l’on ferre le badigeon dans l’enduit au platoir italien : les particules non colorantes sont enfoncées dans la masse et la couleur ressort.
L’application a secco se fait sur le support sec. Le badigeon viendra alors former une pellicule sur l’enduit.
Il est indispensable de faire des essais avant de réaliser votre mélange définitif. La badigeon coloré peut diminuer jusqu’à 50% de son intensité de couleur au séchage. Et pesez bien vos ingrédients pour conserver une unité de tons si vous devez refaire vos mélanges.
Les adjuvants
L’agent mouillant assure une meilleure intégration du pigment dans l’eau. Quelques gouttes de savon noir suffisent.
La talc, entre 5% et 10% du poids de la chaux donne plus de glissant et de texture.
Un rétenteur d’eau, dosé à 1% à 3% du poids de la chaux, offre plus de confort de travail si la température est élevée et/ou si le support est très poreux.
Les charges
Il est possible de rajouter des charges dans un badigeon. Vous obtiendrez un mélange plus dense mais aussi plus difficile à appliquer.
Attention aux blancs (Meudon, Espagne…) qui vont éteindre vos couleurs et vous entraîner vers des tons plus pastels. Seul le sulfate de baryum, qui était employé dans les gouaches sous l’appellation «blanc permanent», reste neutre et ne détériore pas les autres couleurs.
Les pigments
Les pigments sont la matière colorante. Vous les trouverez à l’état de poudre sèche plus ou moins fine. Utilisés dans les peintures et les enduits, ils ont la même nature qu’une charge comme la craie ou la poudre de marbre et il faut donc les considérer comme tel dans les calculs de vos proportions.
Il existe des pigments minéraux et des pigments organiques, naturels ou artificiels. Les pigments organiques sont à éviter car la chaux les altère. Les pigments les plus adaptés seront ceux qui résistent le mieux aux milieux alcalins (chaux), à la lumière, à l’action des agents atmosphériques et à l’attaque des acides pour éviter les efflorescences. Les bons fournisseurs indiquent les compatibilité avec tel ou tel type de liant ou de technique.
Les oxydes métalliques, par exemple, compatibles avec la chaux, ont une couleur qui passe avec le temps.
Chaque pigment a ses caractéristiques propres et un pouvoir colorant particulier.
Au delà d’un certain pourcentage, l’ajout de pigment ne modifiera plus la couleur. On parle alors de limite de saturation des couleurs. Dépasser ces limites ne permet plus de monter en couleur. L’ajout excessif de pigment dans un badigeon, appliqué a secco, épaissit le mélange et augmente la charge à fixer ; cela peut entraîner des problèmes (farinage, décollement, nuance de couleurs, tâches, micro-faïençage). En revanche, dans une technique a fresco vous pourrez vous permettre de dépasser les seuils de saturation car c’est le support lui-même, l’enduit, qui fixera la teinte.
D’une manière générale :
- Avec les terres naturelles, ne pas dépasser 25% du poids de la chaux.
- Avec les oxydes artificiels, ne pas dépasser 15% du poids de la chaux.
- Avec les pigments synthétiques, ne pas dépasser 3% du poids de la chaux.
bonjour, j’ai une question concernant un mur recouvert de “sablette” qui me paraît être ciment et sable mais qui boit qd mm l’eau un peu. Voilà, je souhaite intervenir sur cette “sablette”pour obtenir un toucher moins agressif, que me conseilleriez-vous?
j’ai un peu pensé à une adjonction de plâtre : 1ère couche chaux aérienne, sable et plâtre, 2nde un badigeon coloré et plus de couches si besoin…
J’ai du plâtre fin, chaux aérienne et sable 0/2 lavé…
Merci d’avance, et quelles proportions utiliseriez-vous? il ne s’agit pas de remplir de gros trous, juste quelques mm…
Kristo
Bonjour, personnellement je n’utilise jamais de plâtres standards (toujours adjuvantés) en mélange chaux/sables (enduits poreux et très sensibles à l’humidité), seulement du plâtre gros. Dans le cas que vous décrivez, j’utiliserais la pâte de ragréage Sika ViscoCim 110 (ne bloque pas l’humidité dans les murs). Vous pouvez la mélanger avec du plâtre (type Lutèce rouge) dans une proportion de 1 volume pour 1 à 1,5 volume de plâtre. Si votre mur est “stable” et qu’il ne dépose pas de particules dans tous les sens (sinon, attention aux grains de sables et particules qui viendront abîmer votre lissage), vous pourrez même l’utiliser seul. C’est vrai que, dans ce dernier cas, la prise en main est déroutante au début : il est très liquide mais, dès que vous l’aurez un peu maîtrisé vous avancerez très vite et le résultat sera top. De plus, je trouve que le coût de revient est très intéressant (couvre énormément). Je le prend chez Point P. En revanche, je n’ai jamais essayé de réaliser un badigeon dessus (à tester) mais seulement des peintures à la colle de peau et le résultat est superbe.